Après la LEN, les MEN : Martyrs de l'Economie Numérique
C'est logique, et c'est dans l'ordre alphabétique.
Si l'on continue selon le même processus, les prochaines étapes seraient le NEN,
qui saluerait la victoire des Nantis de l'Economie Numérique, l'OEN, puis ... le PEN ...
La lourde condamnation prononcée le 2 février à l'encontre d'Alain Oddoz,
ce professeur de 28 ans désigné pour être l'épouvantail de l'Internet français,
suscite à juste titre bien des émois et des réactions d'indignation et de révolte.
Les forums ne tarissent pas de témoignages de soutien, de propositions de collectes, de projets de création d'associations.
Ces élans de générosité, de solidarité spontanés à l'égard d'un individu injustement isolé du groupe et livré à la vindicte des puissants,
sont bien sûr l'expression de ce que l'âme humaine a de meilleur.
Vous surprendrai-je en vous disant que la loi les punit ?...
Voici ce que dit l'article 40 de la loi du 29 juillet 1881, définissant ce que les pays totalitaires ont au moins le courage d'appeler
"délit d'opinion",
mais que nous appelons, nous autres, "loi sur la liberté de la presse" :
"Il est interdit d'ouvrir ou d'annoncer publiquement des souscriptions ayant pour objet d'indemniser des amendes, frais et dommages-intérêts
prononcés par des condamnations judiciaires, en matière criminelle et correctionnelle, sous peine de six mois d'emprisonnement et de 45000
euros d'amende, ou de l'une de ces deux peines seulement."
J'aime bien le "seulement", à la fin !
On reconnaît là tout le cynisme de la justice, de ceux qui la font, de ceux qui l'appliquent.
"Loi sur la liberté ..." / "Il est interdit ...". Ça aussi c'est pas mal ...
Quand on passe en revue les principaux articles de cette loi, dont le terrible article sur la diffamation,
qui empêche littéralement la dénonciation de tout scandale, on s'aperçoit finalement
que la liberté d'expression concerne surtout ceux qui n'ont rien à dire.
Le positif dans tout cela, c'est l'apprentissage (par le vécu, et donc indélébile),
que font des milliers, des centaines de milliers de citoyens, des jeunes pour la plupart,
de ce qu'est véritablement la démocratie, ou plutôt de tout ce qu'elle n'est pas :
Un juge condamne au nom du Peuple.
Mais si le Peuple estime que le juge s'est "trompé", le Peuple n'a le droit que de fermer sa gueule.
Ou de l'ouvrir pour aboyer inutilement.
Mais surtout pas d'aider le malheureux.
Or, ceci est contraire à un principe fondamental de notre société, que chacun nomme selon ses convictions :
La Charité chretienne, la Fraternité républicaine, la Solidarité populaire.
En cela, on n'est pas loin du temps de Villon, où l'on pendait de pauvres bougres au sommet des collines,
et où il était interdit de les décrocher avant qu'ils ne soient plus que lambeaux et squelettes,
pour que les gueux voient bien les corbeaux et les pies leur arracher les yeux et leur manger la langue,
et que cela serve d'exemple.
Nous sommes au moyen âge, et les seigneurs sont les lobbies, princes de l'industrie du disque, barons,
marquis, comtes et ducs de l'agroalimentaire, de l'industrie pharmaceutique, du béton,
rois de la banque et de l'assurance.
Ainsi, ce qui ressort des tribunaux de notre moyen âge câblé,
c'est que le fait de télécharger des chansons à partir d'un réseau s'avère plus répréhensible,
donc plus grave aux yeux de notre société,
pire dans son échelle des valeurs morales,
que de répandre la mort en diffusant, délibérément et
en pleine connaissance de cause, du sang contaminé.
10/02/05
Liens
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Nul ne peut l’ignorer, la Chambre criminelle a confirmé, le 18 juin 2003, les non-lieux prononcés par la chambre d’instruction de la
Cour d’appel de Paris, le 4 juillet 2002 (Voir C. Lienhard, "Sang contaminé : un cas exemplaire de maltraitance et d’indignité
judiciaire", J.A.C. n° 26, juillet 2002).
Cet arrêt met fin aux poursuites engagées à l’encontre de trente et une personnes. Il s’agit tout d’abord de responsables administratifs présents en 1985 dans divers cabinets ministériels concernés par la diffusion de sang contaminé : les directeurs de cabinet ou conseillers techniques du Premier Ministre, du ministre des Affaires sociales et de la solidarité, du secrétaire d’Etat à la Santé. Parmi les responsables de haut rang figurent également le directeur général, le sous-directeur et le chef de bureau à la direction générale de la Santé du Secrétariat d’Etat à la Santé, le directeur général du Laboratoire national de la santé, un médecin inspecteur de la santé publique à la DDASS du Haut-Rhin. Des directeurs de centres de transfusion, qu’il s’agisse du centre national ou de centres régionaux ou départementaux sont également au rang des personnes poursuivies, ainsi que quelques médecins, spécialistes de l’hémophilie, prescripteurs ou anesthésistes.
Le "casting" est impressionnant bien que moins brillant que celui du procès qui a déjà eu lieu devant la Cour de Justice de la République laquelle eut à se prononcer sur la culpabilité de trois ministres poursuivis pour homicide et blessures involontaires, deux d’entre eux furent renvoyés des fins de la poursuite et le troisième dispensé de peine.
[...]
Le scandale du sang contaminé réside dans la diffusion de produits dont certains hauts responsables n’ignoraient pas le danger.
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"La justice égale pour tous !...
Ils ne doutent de rien, ces utopistes !"
Jossot, l'Assiette au beurre, 1901
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